Emmanuel Macron présente sa vision pour la souveraineté européenne

In Action Extérieure, Actualité de l'Union européenne, Entreprises, Industrie, Sécurité-défense by Camille

A l’occasion d’un déplacement à La Haye (Pays-Bas), le 11 avril dernier, le président français Emmanuel Macron a présenté sa vision pour une Europe plus souveraine, moins dépendante de ses partenaires, sur tous les plans, notamment économique. Soulignant le rôle joué par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine dans la prise de conscience de l’importance de cette souveraineté, le président a détaillé cinq piliers au travers desquels pourraient être réduites les dépendances de l’UE.

Pilier 1 - La compétitivité de l’UE

Premier pilier dégagé par le président français, la compétitivité de l’UE a été présentée comme essentielle pour assurer sa position de continent producteur et autonome dans sa prise de décision. Emmanuel Macron a ainsi souligné la nécessité de développer cette compétitivité, notamment via la simplification et la rationalisation des réglementations et l’accentuation des efforts dans les domaines de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la formation.
Le président français a par ailleurs insisté sur l’importance d’améliorer l’intégration des marchés européens et de défendre une approche commune, en particulier concernant le financement de l’économie européenne. Il a ainsi plaidé pour une meilleure circulation des capitaux afin de renforcer l’économie européenne, soutenant l’idée d'une unification des marchés de capitaux et d’une meilleure affectation de l’épargne, qui devrait selon lui cibler en priorité les PME innovantes et les pays européens à revenus faibles ou intermédiaires.

 

Pilier 2 - La politique industrielle de l’UE

Emmanuel Macron a par ailleurs insisté sur la nécessité de renforcer l’indépendance industrielle de l’UE dans des domaines stratégiques, en prenant en compte les effets du changement climatique. Le président français a notamment encouragé le soutien à l’innovation pour accompagner les transitions écologiques et énergétiques dans l’industrie, afin de parvenir à l’objectif d’une industrie zéro émission nette à horizon 2050.
Largement partagée au sein de l’UE, cette vision est ainsi portée par la Commission européenne dans plusieurs de ses récentes propositions comme la législation relative à l’industrie à zéro émission nette dans le cadre du plan industriel du Pacte vert européen ou encore le Règlement sur les matières premières critiques, visant entre autres à réduire la dépendance de l’UE à l’approvisionnement par des pays tiers.

 

Pilier 3 - Protection des intérêts stratégiques de l’Europe

Le troisième pilier de la vision présentée par Emmanuel Macron, la protection des intérêts stratégiques de l’Europe cible plus particulièrement les menaces numériques auxquelles sont exposés les citoyens et acteurs économiques et institutionnels européens. S’il a rappelé son attachement à la liberté d’expression, le président français a également plaidé dans son discours pour une meilleur encadrement des contenus numériques dans les domaines de l’éducation et de la culture, une démarche déjà entamée par l’Union européenne avec l’adoption du paquet législatif sur les services numériques (DSA-DMA) en novembre 2022.

 

Pilier 4 - Réciprocité dans les relations extérieures

Le président français a particulièrement insisté sur l’importance de la réciprocité dans les relations extérieures, quatrième pilier de sa vision pour la souveraineté de l’UE. Emmanuel Macron a en effet souligné le rôle central de ce principe dans la nouvelle génération d’accords commerciaux de l’UE qui devront, afin de garantir un commerce équitable, répondre de trois priorités essentielles pour les années à venir :

  • Soutenabilité, en s’assurant que les accords commerciaux ne soient pas conclus au détriment des objectifs européens en matière de lutte contre les effets du changement climatiques et environnementaux. Le président a ainsi appelé à ce que les futurs accords de libre-échange entre l’UE et des pays tiers contiennent systématiquement une clause de respect des engagements européens en faveur de la biodiversité.
  • Equité et équilibre des concessions, pour préserver l’économie européenne et ses secteurs les plus sensibles
  • Clarification des intérêts stratégiques de l’accord pour l’UE, en mettant notamment en place un dispositif de mesures miroir pour s’assurer que les mêmes contraintes pèsent sur les producteurs de l’UE et ceux des pays tiers.

 

Pilier 5 - Coopération sur le plan multilatéral

Enfin, cinquième et dernier pilier de la vision d’Emmanuel Macron pour une Europe souveraine, la coopération sur le plan multilatéral a été présentée comme un outil essentiel de promotion du modèle européen à l’international. Le président français a ainsi plaidé pour qu’une série de coopérations soient établies afin de revitaliser et étendre la politique multilatérale de l’UE, notamment concernant la stratégie européenne de résolutions et de gestion des conflits.
Emmanuel Macron a cependant souligné que cette dynamique de coopération devait se faire dans le respect des valeurs de l’UE, en imposant des règles d’accès au marché unique. Le président français a ainsi félicité la mise en œuvre de mesures visant à l’interdiction d’importation de produits issus de la déforestation ou du travail forcé dans des pays tiers au sein de l’espace communautaire.

 

Une position diplomatique controversée

Outre cette vision globale sur la souveraineté européenne et la nécessité de réduire les dépendances de l’UE, c’est la position d’Emmanuel Macron sur les relations diplomatiques de l’UE qui a fait l’objet de controverses. En effet, le président a notamment appelé à ce que l’Europe conserve une autonomie géopolitique et qu’elle ne soit pas systématiquement alignée sur les positions de ses alliés.

Un discours qui n’a pas manqué de raviver les critiques déjà émises par les alliés en question vis-à-vis des propos tenus par le chef de l’Etat français quelques jours auparavant, au cours d’un entretien accordé à quelques journalistes à l’occasion d’un déplacement en Chine. Durant celui-ci, Emmanuel Macron avait notamment déclaré que l’UE n’était pas tenue de s’adapter à l’agenda des autres en matière de sécurité, notamment sur celui de Washington concernant la question de Taïwan, et qu’elle aurait tout intérêt à se tenir éloignée de conflits n’étant pas les siens. Plusieurs Etats membres et acteurs de l’UE ont ainsi réagit à cette déclaration, rappelant que les Etats-Unis étaient perçus par beaucoup comme un garant de sécurité face à la Russie et à la Chine. Le vice-président de la Commission européenne et haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, a quant à lui appelé à ce que les Etats membres alignent leur position vis-à-vis de Pékin.


Plus d'informations 

Discours prononcé par Emmanuel Macron le 11 avril 2023 à La Haye

Print Friendly, PDF & Email