Cette proposition intervient dans le cadre du
Plan d’action Zéro Pollution adopté par la Commission européenne en mai 2021, qui vise notamment un bon état de santé des sols à horizon 2050. Contrairement à l'air et l'eau, les sols n'avaient pas de législation propre pour les protéger de la pollution, tandis que
60% à 70% des sols européens sont dégradés, notamment par l'expansion urbaine et l'agriculture intensive.
Or, les sols abritent de nombreux organismes vivants et jouent un rôle essentiel dans l'économie européenne et la lutte contre le changement climatique, via la production de denrées alimentaires et de bois, ou encore la séquestration de carbone. La contamination des sols de l'UE, qui coûterait ainsi plus de 50 milliards d'euros par an, aggrave le dérèglement climatique, dégrade la biodiversité, et menace la santé des citoyens.
Vers des mesures de surveillance, d'évaluation et d'amélioration de la qualité des sols
Les eurodéputés souhaitent l'élaboration d'une définition harmonisée de la qualité des sols européens et leur classement en cinq catégories selon leur niveau de contamination : état écologique élevé, bon, modéré, dégradé et gravement dégradé. Le texte adopté par le Parlement prévoit également la création d'un registre commun pour recenser les sites contaminés, qui sont estimés au nombre de 2,8 millions par la Commission européenne.
Par ailleurs, les États membres seront chargés d'appliquer le principe du pollueur-payeur. Ainsi, une fois que les autorités nationales auront enquêté et identifié les sites contaminés, les acteurs à l'origine de la dégradation des sols devront financer leur décontamination.
Enfin, cette directive a pour ambition de servir de boussole à d'autres politiques communautaires, en particulier la politique agricole commune (PAC).
En 2006, la Commission avait déjà proposé un projet de directive “définissant un cadre pour la protection des sols”. La proposition avait finalement été abandonnée en 2014 en raison du refus de l’Allemagne, de l’Autriche, du Royaume-Uni, des Pays-Bas et de la France, qui estimaient que le texte outrepassait les compétences nationales et aurait généré des coûts substantiels.
Durant les années qui ont suivi, le projet de législation sur les sols est resté lettre morte, jusqu'à ce que le Parlement européen s'empare du sujet et rédige une résolution en avril 2021 afin d'inviter la Commission à proposer un cadre juridique de surveillance et de protection des sols. Ainsi, le 5 juillet 2023, la Commission publiait un nouveau projet de directive. Or, plusieurs ONG environnementales regrettent la moindre ambition de ce texte par rapport au projet avorté en 2014.
Par ailleurs, lors d'une session publique en date du 18 décembre 2023 et qui a réuni les 27 ministres de l’Environnement ainsi que le commissaire chargé de l'Environnement Virginijus Sinkevičius, plusieurs États membres ont alerté sur le risque que la directive génère des coûts administratifs importants et ont défendu une meilleure prise en compte des spécificités de chaque territoire, tout en garantissant le respect des compétences nationales, conformément au principe de subsidiarité.
Malgré ces réserves, les États membres et défenseurs du texte soulignent la nécessité de définir un cadre législatif commun, en complément des législations nationales existantes, pour surveiller et améliorer la santé des sols, et ainsi garantir la protection de la biodiversité et de la santé des citoyens, mais aussi la souveraineté alimentaire de l'UE sur le long terme.
Prochaines étapes
Le texte sera réexaminé en deuxième lecture par le nouveau Parlement à l'issue des élections européennes afin de trouver un accord définitif avec le Conseil. Une fois adoptée, la directive devra être transposée dans les législations nationales, à la différence d'un règlement, qui s'applique directement dans tous les Etats membres.