Le 14 mars dernier, les ministres européens en charge de l'Agriculture se sont réunis pour débattre des mesures d'urgence à adopter pour résoudre la crise agricole que connaissent actuellement les éleveurs européens.
En amont de ce haut rendez-vous, la France, représentée par Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, avait étroitement travaillé avec l'Allemagne, pour rallier les différents États membres autour d'un papier commun.
A la lecture des conclusions du Conseil, on constate que la plupart des propositions faites par la Commission européenne le 14 mars se nourrit des mesures suggérées par la France.
Tout d'abord, parmi les mesures de régulation du marché proposées par la Commission figurent :
- Le doublement des plafonds des quantités d’intervention pour la poudre de lait écrémé (218 000 tonnes) et le beurre (100 000 tonnes) ;
- Instauration d’un nouveau système de stockage privé du porc.
Sur base de l’article 222 de l’OCM unique, la Commission est ensuite prête à autoriser les producteurs (organisations de producteurs, organisations interprofessionnelles et coopératives, ce qui représente 80% de la production) à s’entendre pour réduire les volumes de production de manière à avoir un effet sur les prix. Cette dérogation est provisoire puisqu’elle n’est autorisée que pendant 6 mois, renouvelables une fois. Il s’agirait donc d’une dérogation à la libre concurrence, mais uniquement volontaire. La France souhaiterait que cette mesure soit accompagnée d’une incitation financière provenant du budget de l’UE, mais à ce jour la Commission semble y être réticente au regard des contraintes budgétaires. Le Commissaire souhaiterait par ailleurs éviter de devoir recourir à la réserve de crise. A ce sujet, la plupart des États membres s’accordent sur le fait d’utiliser cette réserve, dans le cas où il n'y aurait plus de fonds disponibles.
Le Commissaire européen en charge de l’Agriculture, Phil Hogan, autorise par ailleurs une aide d’état exceptionnelle de 15 000 euros par agriculteur et par an sans plafonds par pays. En d’autres termes, tous les agriculteurs en difficultés seront éligibles à cette aide nationale.
La Commission propose également l’instauration d’un système européen de crédits à l’exportation, pour compléter notamment les systèmes qui existent déjà dans certains pays (exemple allemand de garantie pour des exportations).
Par ailleurs, l’exécutif européen accepte la mise en place d’un observatoire européen du marché de la viande (bovine et porcine), tel qu’il existe déjà pour le lait.
S’agissant du développement rural, la Commission européenne considère qu’il y a déjà de nombreuses mesures possibles que les États membres peuvent utiliser dans le cadre du FEADER pour lutter contre la crise, mais qu’ils ne le font pas (exemple de la mesure de stabilisation des revenus des agriculteurs + l’accélération possible des révisions/modifications des programmes de développement rural).
S’agissant du renforcement du pouvoir de négociation des agriculteurs dans la chaîne de production, très peu de propositions concrètes ont été faites.
Enfin, concernant l’embargo russe, le sujet serait remonté au niveau politique, et il ne figurerait donc plus entre les mains du Commissaire Hogan. A priori, il y aurait peu de progrès en la matière à ce jour.
Les deux textes législatifs (un acte délégué et un acte d’exécution) devraient être validés courant du mois d'avril. A l’heure actuelle, ils ne sont pas encore passés en consultation interservices à la Commission européenne.