Le 1er juin dernier, la Commission européenne a dévoilé ses propositions législatives tant attendues sur le futur de la PAC après 2020.
Présentées non pas comme une « réforme » mais comme un « ajustement » de l’actuelle politique, ces propositions introduisent néanmoins une nouveauté dans le mode de gouvernance. La Commission européenne propose en effet, tel qu’elle l’avait annoncé depuis quelques mois déjà, d’accorder davantage de flexibilité aux États membres dans la mise en œuvre de la future PAC. La ligne de partage entre l’Union européenne et les États membres est donc revue. L’idée consiste à définir de grands objectifs et priorités à l’échelle européenne, puis de laisser aux États membres la définition des moyens d’y parvenir.
Concrètement, ces documents proposent que des plans stratégiques nationaux soit élaborés par chaque État membre (un seul par pays), puis validés par la Commission européenne, définissant les mesures et les moyens mis en place pour atteindre les résultats attendus au niveau européen.
Dans un souci de simplification, la Commission européenne propose également une nouvelle architecture pour les aides du premier pilier. Ces paiements, destinés à un soutien direct des agriculteurs, seraient ainsi composés comme suit :
- Un paiement de base à l’hectare : les États membres pourront décider de ne pas appliquer un taux uniforme de soutien à l’hectare sur leur territoire mais ils devront tout de même mettre en place un outil de convergence prévoyant qu’en 2026, aucun paiement ne devra avoir une valeur inférieure à 75% de valeur moyenne nationale ou de la région homogène
- Un paiement redistributif : les premiers hectares de chaque exploitation bénéficieront d’une majoration fixée par hectare pour un nombre maximal d’hectares éligibles (seuils définis au niveau national)
- Un paiement jeunes agriculteurs : une aide complémentaire pourra être accordée aux jeunes agriculteurs jusqu’à 2% de l’allocation nationale
- Un paiement volontaire pour les engagements environnementaux allant au-delà des règles de base : les États membres devront proposer des mesures allant plus loin que celles prévues dans le règlement de base et être différentes de celles prévues dans le deuxième pilier.
Les mesures environnementales qui seront introduites dans les paiements de base (et donc obligatoires) intègreront le verdissement qui avait été mis en place en 2013. En d’autres termes, la conditionnalité renforcée proposée par la Commission européenne intègrera 13 exigences règlementaires (dont les directives « nitrates », « oiseaux », « habitats », « bien-être animal »), et 12 mesures agroenvironnementales, dont cinq nouvelles (rotation des cultures, maintien des prairies permanentes, outils de gestion durable des nutriments…)
Par ailleurs, l’un des autres axes majeurs de ces propositions est un plafonnement des paiements directs à 100 000 euros par exploitation. Une dégressivité sera appliquée à partir de 60 000 euros.
S’agissant du développement rural, les mesures devront être également adoptées dans le cadre des plans stratégiques nationaux. Le taux de cofinancement de ces mesures est fixé à 70% dans les régions les moins développées, 65% dans les zones de handicaps naturel et 43% pour le reste. Ce taux s’élèvera à 80% pour les mesures agroenvironnementales, les mesures Natura 2000 et les mesures coopération.
Enfin, les documents publiés le 1er juin dernier proposent qu’au moins 5% de l’enveloppe nationale soit consacrée aux mesures Leader, et 30% aux mesures en faveur de l’environnement.
Les États membres auront en outre, la possibilité de transférer jusqu’à 15% de leurs enveloppes du premier vers le second pilier et inversement.
Ces propositions s’inscrivent dans un contexte de tension budgétaire puisque la proposition de la Commission européenne sur le futur cadre financier pluriannuel 2021-2027 envisage une baisse de 5% du budget alloué à la PAC (en euros courant, soit beaucoup plus importante en euros constant).
La balle est désormais dans le camp du Parlement européen et du Conseil, qui doivent maintenant se saisir de ces propositions.
La Commission compte sur un accord qui serait trouvé au plus tard au printemps 2019, avant les prochaines élections européennes en mai 2019. Si les délais sont tenus, le texte entrera en vigueur le 1er janvier 2021.
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htttp://ec.europa.eu/commission/publications/natural-resources-and-environment_fr