La Cour des comptes européenne (CCE) a récemment épinglé la Commission européenne sur les chiffres avancés sur la période 2014-2020 concernant ses dépenses en faveur de l'action climatique. La Commission avait annoncé avoir dépensé 216 milliards d'euros pour le climat en 6 ans, la CCE a estimé ce chiffre à 144 milliards, soit bien moins que l'objectif fixé de 20% des dépenses totales de l'UE consacrées au climat.
Une méthodologie critiquée, un chiffre volontairement gonflé
Dans un rapport de 63 pages, la Cour des comptes européenne s'est montrée particulièrement critique de la méthodologie employée par la Commission européenne pour calculer ses dépenses en matière d'action climatique.
Le rapport pointe ainsi que d'une part toutes les dépenses liées au climat dans le cadre du budget européen ne sont pas en réalité toutes liées à l'action climatique et que, d'autre part, certaines dépenses ont été prises en compte dans le budget alors qu'elles n'ont pas encore été réellement effectuées. Ainsi, les dépenses en pourcentage du budget engagé, relatives à l'action climatique, seraient bien loin de l'objectif de 20% représentant plutôt 13% du budget de l'UE. Le fait que certains fonds non utilisés ou non déboursés soient considérés comme utilisés dans le cadre de l'action climatique dans le budget de l'UE est particulièrement montré du doigt. Le rapport pointe également la prise en compte dans le budget européen des seuls impacts positifs des dépenses climatiques alors que celles-ci peuvent aussi avoir des effets négatifs sur le climat. Ainsi, par exemple, des dépenses en faveur de l'agriculture biologique induisent aussi des effets négatifs comme une baisse de la production agricole et donc des importations de céréales depuis l'étranger induisant de la pollution.
Des problèmes méthodologiques qui subsistent pour la période actuelle
La CCE s'inquiète car les mêmes problèmes demeurent pour la période de programmation actuelle allant de 2021 à 2027, estimant même que l'artificialité des chiffres avancés risque de s'aggraver. En outre, les problèmes de définition des objectifs climatiques et la prise en compte des effets négatifs de certains investissements climatiques demeurent. A cela s'ajoute la difficulté à calculer la réalité des impacts environnementaux du fonds de relance de l'UE, la CCE craignant que les dépenses liées à ce fonds soient systématiquement comprises dans celles liées à l'action climatique par la Commission européenne.
C'est dans le domaine de la politique agricole que les dépenses liées à l'action climatique sont le plus surestimées. La pertinence climatique des investissements réalisés dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC) demandent à être clarifiés selon la CCE. Les investissements en faveur de l'action climatique des secteurs du transport ferroviaire, de l’électricité et de la biomasse sont également parmi les plus surestimés.
La Commission européenne a contesté ce rapport de la Cour des comptes européenne défendant l'atteinte de son objectif de 20% des dépenses de l'EU liées à l'action climatique et déclarant que celles-ci atteindrait bien 30% pour la période 2021-2027. La Commission a déclaré que la méthodologie qu'elle employait était : "solide et fiable précisément parce que ses hypothèses de base sont claires, raisonnables, communiquées de manière transparente et correctement appliquées". Une opinion loin d'être partagée par la Cour des comptes européenne.