"David a enfin terrassé Goliath. L’équité, une nourriture plus saine et les droits sociaux l’ont emporté sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Pour la toute première fois dans l’histoire de l’UE, les agriculteurs, les producteurs et les consommateurs ne seront plus intimidés par les gros joueurs" a ainsi déclaré le rapporteur Paolo de Castro (S&D/Italie) au sujet de la directive visant à interdire les pratiques commerciales déloyales. Le 12 mars 2019, lors d’une séance plénière, le Parlement européen a en effet adopté à une large majorité, le rapport sur la future directive légiférant les pratiques commerciales déloyales, c’est-à-dire des « pratiques entre entreprises qui s’écartent de la bonne conduite commerciale et sont contraires aux principes de bonne foi et loyauté ».
Ce texte a pour objectif de mieux protéger les agriculteurs des pratiques commerciales déloyales qui ont lieu dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Plus précisément, cette directive protégera surtout les petits et moyens fournisseurs dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 350 millions d’euros, face aux gros acheteurs. Les fournisseurs seront répartis dans des catégories (cinq au total), en fonction de leur chiffre d’affaires.
La proposition de cette directive par la Commission européenne, en avril 2018, fait suite aux multiples appels du Parlement européen (depuis 2010) à la mise en place de mesures visant à lutter contre les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne alimentaire ; pratique qui coûterait selon la Commission européenne entre 1 à 2 % du chiffre d’affaires des PME agricoles et agroalimentaires. De ce fait, elles menacent la survie des petits producteurs alimentaires, qui sont, dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire, a priori, les acteurs les plus vulnérables.
Pour rappel, la commission Agriculture du Parlement européen avait adopté sa position sur le sujet le 1er octobre 2018, dans laquelle elle soulignait la nécessité d’avoir une chaîne d’approvisionnement alimentaire plus équitable, qui rééquilibrerait le rapport de force entre producteurs et distributeurs.
Au fond, cette directive établit une liste des pratiques commerciales interdites telles que le paiement de produits périssables au-delà de 30 jours après leurs livraisons (ou de 60 jours concernant les denrées non-périssables) ou encore le changement unilatéral des conditions du contrat par l’acheteur ou bien l’annulation unilatérale d’une commande de produits périssables à moins de 30 jours de la date de livraison convenue. A noter que certaines pratiques a priori interdites, pourraient être exceptionnellement autorisées si elles sont préalablement convenues dans le cadre d’un contrat d’approvisionnement. A titre d’exemple, le fait de faire payer au fournisseur les frais de stockage ou de référencement de ses produits.
Ce texte est aussi l’occasion de préciser les contours des procédures de plaintes. Ainsi, les fournisseurs pourront porter plainte à l’endroit où ils sont établis, cela même si l’abus se déroule ailleurs sur le territoire de l’UE. De fait, les autorités répressives de chaque État membre seront en mesure de recevoir la plainte et de d’y donner suite, jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée.
Mais avant d’entrer en vigueur, le Conseil devra approuver ce texte. Alors, les États membres auront 24 mois pour transposer la directive dans leur législation nationale ; les règles devront commencer à être appliquées maximum 30 mois après l’entrée en vigueur du texte.