Le 11 décembre, la Commission a publié une communication visant à aider les pays de l’UE à lutter contre les menaces hybrides et à renforcer la sécurité aux frontières extérieures de l’UE dans le cadre notamment des tensions existant aux frontières avec la Russie. Elle inclut dans les menaces hybrides "l'instrumentalisation des migrants" et accepte la mise en oeuvre de dérogations pour limiter le droit d'asile, ce qui a fait réagir des députés européens comme des associations de défense des droits humains.
La Commission définit des mesures exceptionnelles pour lutter contre les menaces hybrides menées par la Russie et la Biélorussie
Depuis le début de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine en 2022, la Russie est accusée de mener des attaques hybrides pour destabiliser les pays à l'est de l'Europe comme la Finlande et la Pologne. L'une de ces attaques hybrides consiste à instrumentaliser les migrations en ne contrôlant plus les migrants souhaitant entrer en Europe via une frontière commune avec la Russie ou la Biélorusse. En 2024, le nombre de personnes entrées dans l'UE par la frontière biélorusse a augmenté de 66% par rapport à 2023.
La Commission européenne a donc publié une communication en réponse à ces attaques dans laquelle elle indique qu'elle ne tolèrera " aucune tentative de la part de la Russie, de la Biélorussie ou de tout autre pays d’utiliser les valeurs de l’UE contre l’Union, y compris le droit d’asile, à des fins politiques". Dans cette communication de 10 pages, elle présente :
- Les défis aux frontières terrestres extérieures de l’UE avec la Russie et la Biélorussie et les menaces pour la sécurité de l’Union ;
- La réponse politique de l'UE et le soutien opérationnel mis en place : En plus des efforts déjà mis en oeuvre, la Commission met à disposition de 6 pays (Estonie, Lettonie, Lithuanie, Norvège, Pologne et Finlande) des financements additionnels à hauteur de 170 millions d'euros pour renforcer la surveillance des frontières avec la Russie et la Biélorussie notamment à travers l'instrument relatif aux visas et à la gestion des frontières (IGFV) ;
- Le cadre juridique européen : La Commission rappelle que les Etats membres ont l’obligation de protéger les frontières extérieures de l’UE. Elle estime qu'au regard de la gravité de la situation, les Etats membres peuvent mettre en place des "mesures exceptionnelles" qui pourraient limiter le droit d'asile. La Commission indique que ces mesures doivent être proportionnées, limitées à ce qui est strictement nécessaire dans des cas clairement définis et temporaires ;
- Le renforcement de la coopération avec l’Union et les autres États membres.
La nouvelle position de la Commission sur ces possibles dérogations au droit d'asile a été critiquée par des eurodéputés de différents bords politiques et par les associations de défense des droits humains comme Amnesty International.
Des mesures vivement critiquées par certains députés européens et les associations de défense des droits humains
Plusieurs députés européens, comme Tineke Strik (Les Verts/ALE, Pays-Bas) et Fabienne Keller (Renew Europe, France), ont critiqué cette communication et la possibilité offerte aux Etats membres de rejeter les droits fondamentaux, dont le droit d'asile.
Tineke Strik indique que cette décision "ouvre une boîte de Pandore des dérogations" et "prouve à la Russie et à la Biélorussie que leurs tactiques fonctionnent".
De son côté, Amnesty International estime que c'est "une approbation troublante des violations du droit international et européen par les États européens, qui punissent doublement les personnes ayant besoin de sécurité".