Le mercredi 12 septembre 2018, le Parlement européen réuni en plénière à Strasbourg a adopté sa position sur la réforme du droit d’auteur à l’heure du numérique, non sans controverses. Cette réforme, nécessaire, le régime en vigueur datant de 1996, est particulièrement réclamée par les acteurs de l'industrie culturelle et des médias qui ont vu leurs modèles économiques perturbés par le développement d'Internet au cours des 20 dernières années.
Après avoir initialement rejeté le texte proposé par le rapporteur Axel Voss (PPE/Allemagne) lors de la session du 5 juillet 2018, les députés européens ont cette fois approuvé le texte par 438 voix contre 226. Cette adoption permet maintenant au trilogue institutionnel (les négociations entre la Commission Européenne, le Conseil et le Parlement) de commencer et laisse espérer un accord avant les élections européennes du printemps 2019.
En approuvant l’essentiel des amendements présentés par le rapporteur, le Parlement a finalement adopté une position très proche de celle initialement repoussée en juillet.
I – Le filtre automatique de contenu de l’article 13 modifié
Les parlementaires ont toutefois légèrement modifié l’article 13 consacré à l’hébergement des contenus culturels sur internet. Celui-ci prévoit en effet que, en l’absence d’accord entre les ayants droit (des petits créateurs aux entreprises comme Vivendi Universal ) et les grandes plateformes (Facebook, Youtube, Google), ces dernières soient obligées de mettre en place le très controversé « filtre automatique des contenus ». Ce filtre aurait pour objectif de bloquer la diffusion de contenu étant la propriété intellectuelle d'un ayant droit lorsqu'un utilisateur des plateformes le mettrait en ligne.
Ce texte introduit toutefois davantage de garanties pour éviter les risques de suppressions injustifiées de contenus, et pour que ce « blocage automatique [de contenus] soit évité » le plus possible. Ce risque de blocage automatique abusif figurait d'ailleurs parmi les principales objections des adversaires de la directive.
II – Le droit voisin des éditeurs de presse de l’article 11 pratiquement identique
L’article 11 du projet de directive, qui prévoit un « droit voisin » pour les éditeurs de presse, n’a également été modifié que très légèrement. Il prévoit la création d’un régime de droit d’auteur spécifique devant permettre aux médias de réclamer le paiement de droits lorsque les plates-formes numériques diffusent ou agrègent des extraits d’articles accompagnés d’un lien.
Les adversaires de cet article soulignaient que cette mesure, qui vise les services comme Google actualités, avait déjà fait l’objet de tests très similaires en Espagne et en Allemagne sans résultats : Google s’étant contenté de fermer son service d’actualité sans verser de droits aux éditeurs.
III – Une saga législative à suivre
Après avoir fait l’objet d’une campagne de lobbying intense opposant les défenseurs des libertés numériques et les grandes plateformes aux industries culturelles au cours des derniers mois, ce projet de directive sera maintenant négocié dans le cadre du trilogue institutionnel avec la Commission et le Conseil pour aboutir à une version finale dans les prochains mois.