L’attaque de l’Ukraine par la Russie amène les dirigeants européens à se positionner sur la demande de l’Ukraine de joindre l’Union européenne, huit ans après les importantes manifestations pro-européennes d’Euromaïdan, réprimées violemment par l’ancien gouvernement pro-russe de Viktor Ianoukovytch.
Quatre jours après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a signé une demande officielle d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. Il s’agit d’un important pas en avant de l’Ukraine, sans pour autant impliquer une adhésion à court terme du pays à l’Union. Elle rejoint les pays candidats à l’adhésion que sont l’Albanie, la Serbie, la Bosnie, le Monténégro, la Macédoine du Nord et la Turquie. La Géorgie et la Moldavie, eux aussi intégrés à la politique de voisinage de l’Union européenne ont suivi l’Ukraine en déposant également une demande d’adhésion.
L’adhésion d’un Etat repose sur des critères inscrits à l’article 49 du Traité sur l’Union européenne : le pays doit être européen (sans plus de précision dans le Traité) et respecter les valeurs de l’Union inscrite à l’article 2 du Traité. Les Etats membres doivent ensuite voter à l’unanimité en faveur de l’adhésion du pays, après approbation du Parlement européen à la majorité. L’adhésion doit ensuite être ratifiée par tous les Etats membres selon leurs règles constitutionnelles (référendum ou ratification parlementaire). Par ailleurs, au-delà des règles inscrites dans le Traité, les candidats doivent respecter les critères de Copenhague, définis par les dirigeants européens en 1993 : intégration de l’acquis communautaire (c’est-à-dire reprendre l’ensemble des règles européennes existantes), être une économie de marché, respecter l’état de droit et la démocratie.
Les conditions politiques ne sont pas réunies pour intégrer l’Ukraine à l’Union européenne dans un avenir proche, notamment sur le respect des critères de Copenhague. En effet, plusieurs Etats membres, dont la France, plaident pour une révision des traités européens avant tout élargissement (principalement aux pays des Balkans dont le processus d’adhésion est plus avancé). La question de la fin de l’unanimité au Conseil est évoquée : l’arrivée de membres supplémentaires disposant d’un droit de véto pourrait paralyser l’Union, d’autant que des blocages existent déjà à 27, notamment sur la question du respect de l’Etat de droit et en matière de politique étrangère. Du reste, il semble peu probable que les dirigeants européens acceptent une adhésion de l’Ukraine sans prendre en compte les demandes de la Géorgie et de la Moldavie, et plus encore des pays des Balkans engagés dans un processus d’adhésion plus avancé. La situation économique et politique est un autre frein à l’intégration : le PIB par habitant de l’Ukraine est bien en deçà de la moyenne européenne, le pays souffre d’institutions fragiles ainsi que d’une corruption généralisée. Enfin, l’adhésion entrainerait des conséquences géopolitiques majeures face à la Russie qui considère l’Ukraine comme faisant partie de sa sphère d’influence.
Néanmoins, l’Ukraine a reçu un fort soutien des pays d’Europe centrale en faveur d’une intégration à l’Union européenne, notamment des dirigeants de la Bulgarie, de la République tchèque, de l’Estonie, de la Lettonie, de la Lituanie, de la Pologne, de la Slovaquie et de la Slovénie. Pour sa part, le président du Conseil européen Charles Michel, a admis qu’il existait « différentes opinions et sensibilités au sein de l’UE sur l’élargissement ».