Peu d’avancées sur la gestion des flux migratoires après une rencontre des ministres européens de l’Intérieur

In Action Extérieure, Actualité de l'Union européenne, Migration by Occitanie Europe

Les ministres européens de la Justice et de l'Intérieur se sont réunis le 30 janvier à Varsovie (Pologne) sous l’égide de la Présidence polonaise du Conseil de l'UE pour discuter de nouvelles approches concernant la gestion des flux migratoires. Un des points centraux de la rencontre a été l’exploration du concept des « centres de retours », proposés en mai 2024 par une coalition d’États membres. Cependant, après plusieurs heures de discussions, les ministres n'ont pas réussi à trouver des solutions concrètes ou à définir un cadre opérationnel pour ces centres, qui suscitent encore de nombreuses interrogations.

 

Les "centres de retours" : Un concept flou

 

Le concept des « centres de retours » consiste à créer des infrastructures dans des pays tiers pour accueillir les migrants dont les demandes d'asile ont été rejetées, dans l’attente de leur renvoi vers leur pays d’origine ou de transit. Cependant, les ministres ont soulevé plusieurs questions sans réponse, notamment la solidité juridique de ces centres, la sélection des pays tiers partenaires, ainsi que la responsabilité des États membres concernant les migrants ne pouvant pas être renvoyés. Si certains pays, comme la France, sont réticents à l’idée d’établir des centres dans des pays voisins tels que ceux des Balkans, d’autres plaident pour des structures le plus éloignées possible des frontières de l’UE.

Malgré l’insistance de la Commission européenne pour présenter une révision de la directive « Retours » en mars 2025, et l’inclusion de ces « centres de retours » dans les discussions sur des voies innovantes pour la gestion migratoire, la question reste suspendue. Magnus Brunner, commissaire chargé des Affaires intérieures et de la Migration, a, de son côté, évoqué une législation « ambitieuse », visant à renforcer la coopération entre États membres et à améliorer les conditions de renvoi des migrants, mais sans pour autant donner de précisions concrètes sur les centres.

 

La révision de la directive « Retours » : Vers une législation plus stricte

 

Le projet de révision de la directive « Retours » datant de 2008, dont la Commission prévoit de proposer une nouvelle version en mars, pourrait inclure des mesures plus strictes en matière de détention des personnes déboutées de l’asile et renforcer les obligations de retour. Une des propositions phares est la possibilité de renforcer la reconnaissance mutuelle des décisions de retour entre les États membres, bien que certains pays, tels que la France, y soient opposés, préférant un système basé sur des modalités volontaires plutôt qu’automatiques.

Ce texte de révision s’inscrit dans un cadre plus large, celui du « Pacte Asile et Migration » de l'UE, que certains ministres espèrent voir appliqué avant sa mise en œuvre officielle prévue pour mi-2026. En attendant, des discussions ont également eu lieu sur la suppression du critère de lien de connexion, qui déterminerait le pays vers lequel un migrant serait renvoyé, et sur la création d’une liste de « pays tiers sûrs », mais aucun consensus n’a été trouvé à ce sujet lors de la réunion.

 

La coopération avec les pays tiers : Une priorité pour l'UE

 

La question de la coopération avec les pays tiers sur les réadmissions et le renforcement des partenariats a été mise en avant par le commissaire Brunner. Les ministres ont exprimé leur volonté de renforcer les liens avec des pays tiers sur la question des retours, mais les divergences sont notables sur les pays à privilégier. La Turquie a été brièvement mentionnée comme un possible partenaire, mais plusieurs États membres ont exprimé leur réticence à s'appuyer sur les Balkans occidentaux, par crainte que les migrants renvoyés ne reviennent facilement en UE.

 

Une stratégie pour la sécurité intérieure : Vers un renforcement de la coopération

 

Outre la gestion des migrations, la réunion a également permis aux ministres de discuter de la sécurité intérieure de l'UE, un autre sujet majeur pour la Présidence polonaise. Les défis liés au crime organisé, au sabotage des infrastructures critiques et à la radicalisation en ligne ont été au centre des préoccupations. Le commissaire Brunner a évoqué des initiatives pour renforcer le mandat d’Europol, ainsi que des mesures visant à améliorer l'accès des forces de police aux données, dans une perspective de sécurité renforcée pour les États membres.

Le ministre polonais de l’Intérieur, Tomasz Siemoniak, a souligné l’importance d’une approche commune et a rappelé la nécessité de renforcer Frontex, l’agence européenne de gestion des frontières extérieures. La discussion a aussi porté sur la résilience de l’UE face aux crises majeures, en présence de la commissaire Hadja Lahbib, chargée de la préparation et de la gestion des crises.


Plus d'informations :

Voir la communication de la Présidence polonaise du Conseil de l'UE

Relire l'article "Nouveau durcissement de la politique migratoire européenne en vue ?"

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