Le 15 mai dernier, la Commission européenne a publié deux rapports sur la mise en oeuvre des législations relatives à la politique climatique communautaire. Le premier porte sur la loi européenne sur le climat, la directive sur le système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE) et le règlement sur la répartition de l’effort, tandis que le second traite du règlement sur l’utilisation des terres, le changement d’affectation des terres et la foresterie (UTCATF).
Atteindre la neutralité climatique en 2050
La loi européenne sur le climat adoptée en juin 2021 a introduit la principale cible du Pacte vert pour l'Europe : la neutralité climatique à horizon 2050. Ce texte constitue le point de point de départ d'une série de réglementations et d'initiatives communautaires pour atteindre cet objectif ambitieux, à l'image du paquet Fit for 55, qui vise à concrétiser les lignes directrices de la loi.
Le rapport met en lumière d'autres initiatives mises en oeuvre dans la lignée de la loi sur le climat, dont une communication de la Commission européenne publiée en février 2024 qui présente l'objectif de réduction de 90% des émissions nettes de gaz à effet de serre à horizon 2040 par rapport 1990. Le texte souligne notamment l'importance d'une "transition juste" et la nécessité de financements supplémentaires pour la mise en oeuvre du Pacte vert.
Faire payer les émetteurs de gaz à effet de serre
La directive portant création du Système d'échange de quotas d'émission (SEQE-UE) a été adoptée en 2003. A l'issue de plusieurs révisions, sa dernière version a été votée en mai 2023.
Chaque année, le système définit un plafond de quotas disponibles sur le marché et fixe un prix au carbone. Les entreprises dans les secteurs couverts par le SEQE achètent alors des quotas pour avoir le droit d'émettre des gaz à effet serre, en sachant qu'un quota correspond à l'émission d'une tonne de CO2EQ (équivalent dioxyde de carbone). Le nombre maximal de quotas est abaissé tous les ans pour inciter les entreprises à mettre en place des stratégies de réduction de leurs émissions.
Auparavant, les secteurs couverts étaient l'électricité et la production thermique, les secteurs industriels à forte intensité énergétique (comme les raffineries) et l'aviation commerciale intra-UE. La réforme de 2023 prévoit l'introduction graduelle du transport maritime entre 2024 et 2026 et la création d'un nouveau SEQE spécifique opérationnel à partir de 2027 pour le bâtiment, le transport routier et les carburants pour des secteurs supplémentaires. Elle a aussi instauré des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions à horizon 2030 par rapport au niveau de 2005, passant de 43 % à 62 %. Parmi les progrès réalisés dans le cadre du SEQE, nous pouvons aussi citer la création du Fonds social pour le climat, qui permettra dès 2026 d’utiliser les revenus des ventes de quotas pour soutenir les ménages vulnérables et les micro-entreprises.
Des objectifs individualisés pour chaque Etat membre
Le règlement sur la répartition de l’effort voté en 2018 puis modifié en 2023 cible la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 dans les secteurs qui sont à l'origine de 60% des émissions européennes, à savoir les transports intérieurs (hors aviation), les bâtiments, l’agriculture, la petite industrie et les déchets.
Pour atteindre cet objectif, le texte fixe des cibles chiffrées et adaptées à chaque Etat, dans une logique d'équité. Ainsi, la colonne 2 de l'annexe I liste, pour les 27 Etats membres, les pourcentages de réduction des émissions par rapport aux niveaux de 2005, de 10 % pour la Bulgarie à 50 % pour le Danemark, l'Allemagne, le Luxembourg, la Finlande et la Suède. L'objectif est de la France est à 47,5 %.
Le rapport souligne la nécessité d'accélérer les efforts entrepris pour atteindre ces cibles. En ce sens, la Commission a fait des recommandations au mois de décembre 2023 pour améliorer les plans nationaux en matière d’énergie et de climat.
Les terres : des puits de carbone à préserver
Le second rapport analyse la mise en œuvre du règlement révisé sur l’utilisation des terres, le changement d’affectation des terres et la foresterie (UTCATF). Il rappelle le rôle central des puits de carbone, comme les forêts, dans l'atténuation du dérèglement climatique. Or, leur capacité de séquestration des gaz à effet de serre s'affaiblit continuellement dans l'ensemble de l'Union.
Le règlement UTCATF adopté en avril 2023 vise à renforcer les capacités d’absorption des terres en prenant des mesures fortes concernant l’agriculture et la foresterie. Il enjoint les Etats membres à mettre en place des politiques de gestion et d'utilisation des terres garantissant un niveau d'émissions de gaz à effet de serre inférieur à leur absorption. Et le temps presse. En effet, selon le rapport, l'UE accuse un retard important dans la poursuite de son ambition d’absorption nette d'ici 2030. De plus, en 2023, les Etats membres ont actualisé leurs plans nationaux en matière d’énergie et de climat conçus en 2019 afin de répondre aux ambitions des textes du paquet Fit for 55, qui inclut le règlement UTCATF. Néanmoins, la Commission juge les plans mis à jour peu ambitieux concernant l’utilisation des terres.
Enfin, la Commission a mis à disposition un manuel UTCATF pour accompagner les experts et acteurs des politiques d'utilisation des terres dans l'intégration des objectifs du règlement.
Plus d'informations
- Communiqué de presse de la Commission européenne
- Rapport sur la loi européenne sur le climat, la directive sur le système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE) et le règlement sur la répartition de l’effort
- Rapport sur le règlement sur l’utilisation des terres, le changement d’affectation des terres et la foresterie (UTCATF)