Ce début d'année 2019 est marqué par la prise de fonction de la Roumanie à la Présidence du Conseil de l'UE, et ce, pour la première fois depuis son adhésion à l'UE en 2007. Inaugurant le nouveau trio de présidence tournante (composée également de la Finlande et de la Croatie), la Roumanie a affiché des priorités ambitieuses pour les 6 prochains mois malgré un contexte politique national et européen complexe et écourté par les élections européennes de mai.
Sur le plan national, la situation interne du pays fait l'objet de vives critiques de la part de la Commission européenne. Lors d'une récente conférence de presse à Bucarest, le Président de la CE Jean-Claude JUNCKER a d'ailleurs exhorté le Premier ministre roumain de ne pas exporter les problèmes internes du pays au Conseil de l'UE. En effet, le gouvernement roumain fait actuellement face à une forte opposition, en réaction à plusieurs scandales qui secouent le pays depuis plusieurs mois. D'une part, le président de la Chambre des députés, Liviu DRAGNEA, est accusé par l'OLAF (l'Office européen de lutte antifraude) d'avoir détourné des fonds européens. D'autre part, les récentes réformes entreprises par le gouvernement mettraient en danger l'indépendance de la justice dans le pays, selon la Commission européenne.
Sur le plan européen, la Roumanie devra également faire à plusieurs dossiers majeurs, notamment celui du Brexit, dont le dénouement reste toujours incertain. Le Parlement britannique doit toujours se prononcer sur l'accord qui a été trouvé entre son gouvernement et l'UE en novembre dernier, ce qui peut remettre en cause les conditions de sortie du Royaume-Uni de l'UE. Le sujet des négociations sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027 est également complexe. Enfin, les élections européennes limiteront le temps d'action dont dispose la Roumanie pour opérer les trilogues avec le Parlement et la Commission sur tous les programmes concernés par cette future programmation.
La présidence du Conseil est généralement l'occasion pour le pays en fonction de se mettre en avant, notamment via l’organisation de nombreux événements sur son territoire et à la mise en œuvre de priorités définies en début de mandat. Dans ce cadre, même si l'agenda européen s'annonce très chargé, la Roumanie souhaite défendre les priorités suivantes au cours des 6 prochains mois :
Premier pilier : l'Europe de la convergence
Ce pilier constitue certainement la priorité principale de la Roumanie, comme l'a mis en avant le ministre roumain délégué aux Affaires européennes, George CIAMBA.
La présidence souhaite notamment mettre en avant la politique de cohésion afin de permettre aux différents territoires européens de se développer de façon durable et égale en renforçant la compétitivité au sein de l'UE.
Le pays entend également faire avancer le processus de négociation relatif au Cadre Financier Pluriannuel 2021-2027 (CFP), en concluant les dossiers en cours de discussion avec le Parlement européen. Au delà de la négociation sur le budget de l'UE, les efforts sur l'adoption des textes de politiques sectorielles devront être poursuivis.
Dans ce cadre, les sujets prioritaires énoncés par la présidence roumaine sont : le développement de la dimension sociale de l'UE au travers du Socle Européen des Droits Sociaux, la promotion de la recherche et l'innovation, la numérisation, l'intelligence artificielle, les transports, l'énergie, la PAC et la lutte contre le changement climatique.
Deuxième pilier : Une Europe plus sûre
La Roumanie entend par ailleurs contribuer à consolider la sécurité en Europe et faire face aux nouveaux défis sécuritaires. Tout d'abord, l'accent sera mis sur la coopération entre les États membres pour améliorer l'interopérabilité des systèmes de sécurité européens, notamment face aux cyberattaques.
Une attention sera également accordée aux questions migratoires, qui ont largement été délaissées par la présidence autrichienne. Ce dossier constitue généralement un point de débat intense entre les États membres de l'Union. La question de la gestion des frontières extérieures européennes sera abordée, par le prisme des propositions de la Commission visant à renforcer l'Agence européenne de garde-côtes et de garde-frontières. En ce qui concerne une possible révision du règlement de Dublin sur l'asile, l'ambassadrice de la Roumanie auprès de l'UE, Luminița Odobescu, est restée assez évasive sur cette possibilité.
Enfin, la Roumanie a mentionné sa volonté de faciliter la mise en œuvre du Parquet Européen et de poursuivre la lutte contre le terrorisme en Europe.
Troisième pilier : L'Europe en tant qu'acteur global
En ce qui concerne l'action extérieure de l'UE, la Roumanie souhaite développer "les capacités de défense et de sécurité de l'UE" en complémentarité avec l'OTAN. De plus, un développement de l'action de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) est attendu, avec la création de synergies avec d'autres instruments européens.
L'accent sera également porté sur l'élargissement de l'UE et les actions coordonnées avec le voisinage de l'UE, dans le but de renforcer la sécurité intérieure et extérieure.
Quatrième pilier : L'Europe des valeurs communes
Dans ce volet, la présidence souhaite lutter contre toutes les formes de discriminations et promouvoir l'égalité des chances entre les citoyens.
Ainsi, des initiatives législatives concernant le progrès social, l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, la réduction des écarts de développement et l'amélioration de l'accès à l'éducation et à la formation de tous les Européens seront soutenus par la Roumanie.
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