L’épineuse réforme du droit d’auteur en débat au Parlement européen

In Éducation - Culture - Affaires Sociales by Occitanie Europe

La Commission européenne a proposé en septembre 2016 un projet de révision de la directive européenne sur les droits d'auteur, notamment dans le but de mieux encadrer les services de médias audiovisuels au regard de la loi. En effet, la précédente version de cette directive remonte à 2001, une époque où les réalités et défis auxquels était confronté le droit d'auteur étaient bien différents.

Or, à ce jour, depuis cette proposition, aucun accord n'a été trouvé sur le sujet, que ce soit au sein même de chaque institution européenne, ou entre elles.

Les principaux points d'achoppement portent sur l'équilibre à trouver entre la libre-circulation des œuvres et une rémunération adéquate des artistes/auteurs ; ainsi que l'application des règles de droit d'auteur sur les contenus en ligne.

Les points de blocage dans le détail

L'introduction d'un "droit voisin" : la Commission européenne a proposé la création d'un "droit voisin" du droit d'auteur pour apporter une certaine protection aux éditeurs de presse. Ainsi,  les éditeurs seraient à l'avenir considérés comme détenteurs des droits d'auteurs des articles écrits par les journalistes, qu'on ne pourrait donc plus citer ou indexer sans référencer (comme peuvent le faire les plateformes telles que Google News ou Facebook). Si les organes de presse saluent cet article comme une reconnaissance du travail des médias et journalistes, les représentants des plateformes numériques dénoncent une restriction à la liberté d'expression et au débat en ligne. Les discussions portent également sur la durée de validité de ce droit: si la Commission proposait qu'il soit valable 20 ans, le Parlement a proposé une licence de 5 ans, et le Conseil d'un an seulement.

L'écart de valeur : la Commission européenne propose davantage de coopération entre les plateformes numériques et les ayant-droits pour empêcher la diffusion illicite de leur contenu, et ce, via des techniques efficaces de reconnaissance des contenus : le filtrage automatisé. En effet, une plateforme comme Youtube ne se considère pas comme responsable des contenus postés sur son site, et ne reverse qu'une partie infime de ses revenus aux ayants droits: c'est ce qu'on désigne  "l'écart de valeur". Cet article fait débat, car les défenseurs des libertés numériques craignent une censure automatique des plateformes pour éviter les infractions au droits d'auteur. De plus, le filtrage via un instrument technologique constitue un point chaud, notamment car il exclurait les PME et start-ups qui voudraient se lancer sur le marché face au prix exorbitant de cette technologie. Le Conseil propose donc que les obligations des entreprises soient proportionnelles à leur taille, et que les utilisateurs puissent contester devant un juge la suppression de leur contenu.

La fouille automatique de textes et données : la Commission propose enfin une exception de droits d'auteur dans le cadre de recherche automatique de textes et de données, pour extraire des informations précises ou trouver des relations à des phénomènes. Cette disposition a été plutôt bien accueillie, mais les débats portent sur son élargissement aux entreprises et organismes privés, ce qui faciliterait l'innovation mais mettrait en péril la rémunération des éditeurs de revue scientifiques.

Vote décisif en Commission JURI au Parlement européen

Pendant que les États membres amendent le texte au Conseil pour tenter de trouver une position commune, la commission des affaires juridiques du Parlement européen a difficilement adopté sa position le 20 juin dernier. Les débats ont en effet opposé les différents groupes politiques mais également les plateformes numériques contre les éditeurs de contenus. De nombreux représentants de groupes d'intérêts des différents bords étaient d'ailleurs présents et s'étaient appropriés l'enjeu. Si les éditeurs et ayant droits ont largement salué ce vote, les représentants des plateformes numériques et des industries en ligne se sont montrés déçus.

Cependant, tout n'est pas définitif : la décision devra être confirmée par un vote en plénière au Parlement européen le 4 juillet prochain. Or, si cette décision obtenue de justesse est rejetée, les eurodéputés pourraient rouvrir les négociations. Si la plénière valide cette décision, les négociations se poursuivront ensuite avec le Conseil des ministres et la Commission pour parvenir à une version finale du texte.

L'avenir de cette règlementation est donc très incertain malgré la pression du calendrier pour parvenir à un accord d'ici la fin de l'année.


Plus d'Information:

Communiqué de presse du Parlement européen sur le vote en commission JURI

 

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